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« des centaines d’heures perdues… »

V. et F. vivent en couple dans une ferme sur les bas la barguillère où illes se sont installés en 2009. Avec leurs quelques 80 brebis illes produisent du fromage qu’ils vendent directement depuis la ferme. Avec 6 enfants à charge, dont une seule est majeure en 2013, et 3 en garde alternée. Cette année-là marque le début d’un parcours administratif épuisants. Depuis lors, ils se débattent pour avoir accès à leurs droits et ainsi pouvoir vivre et mener leur activité agricole dignement. Illes nous racontent leur histoire :

Nous avons demandé le RSA au printemps. En novembre, nos droits à cette aide ont été ouverts. Mais aucun versement. Ni aucun référent RSA désigné.

Malgré nos appels réguliers, un courrier en recommandé avec AR, plusieurs visites à une assistante sociale de l’ADS de Saint Girons, nous n’avions toujours ni renseignements ni versements. Toujours dans la même situation, nous avons tardé (quelques mois) à présenter notre avis de non-imposition sur les revenus de 2012. Nous l’avons transmis en juillet, mais au mois d’août, nous avons été radiés. Au début de l’année, nous avons cessé de payer nos cotisations MSA, qui s’élevaient chaque année à environ 3300€ plus 2400€.

En septembre, pour la première fois, la MSA nous versait 6 mois de RSA, pour un montant de 2245€, ce qui correspondait à un montant mensuel de 375€. Nous avons demandé que ces sommes soient réévaluées, en vertu du minimum fixé pour un couple et « 3,5 enfants », qui s’élève à 1100€/mois environ (allocations familiales + RSA). La MSA précisait que ce versement correspondait à la période de novembre 2013 à avril 2014. Mais elle ne disait rien pour le reste de la période écoulée, rien pour l’avenir non plus.

En octobre, on nous signifie une dette de 2000€, en raison d’un trop-perçu d’allocations familiales. Nous avons sollicité le médiateur de la République pour régler cette situation, sans résultat.

En janvier, on nous écrit que cette dette, bien que réduite de moitié pour motif de « précarité », absorbe notre RSA de la fin 2016.

En mars, je me suis rendu à la MSA de Foix pour obtenir des réponses quant aux non-versements. J’ai attendu calmement à l’accueil qu’on me reçoive, jusqu’à ce que la police soit appelée pour me faire quitter les lieux. Peu de temps après, la MSA nous a versé l’équivalent de 4 mois de RSA. Un référent nous est désigné.

En juillet, j’ai renouvelé l’opération et la MSA m’a de nouveau versé 3 mois. A partir d’août, le RSA n’est plus payé. Pour réduire le montant de nos cotisations, V. a cessé d’être déclarée à l’administration comme conjointe collaboratrice. Pour récapituler, de novembre 2013 à avril 2018 (54 mois), nous nous sommes vus verser 13 mois de RSA, avec des retards allant jusqu’à 2 ans.

En début d’année, le RSA nous est versé. Mais la MSA demande que notre ferme soit déclarée en cessation de paiement au Tribunal de Grande Instance de Foix, pour une dette de 17 000€. Au tribunal, on me signifie que la dette est réévaluée à 12 400€. Je la reconnais, en précisant les défauts de versements du RSA. Une conciliation est ordonnée. La conciliation échoue au bout de 4 mois, après que nous ayions opposé nos relevés de compte de 2013 à 2017 à deux récapitulatifs des versements (contradictoires entre eux) de la MSA. Lors des échanges de mails avec le conciliateur, la partie adverse a été insultante et a maintenu ses mensonges. Ils parlaient de droits ouverts et non de versements. Pendant la conciliation, la MSA a régularisé un retard de versement de 2500€, soit environ 6 mois.

Le 5 septembre 2018, le jugement s’achève sur notre mise en redressement judiciaire signifiant que la viabilité de notre ferme est en question. Pourtant, nos rentrées nous ont toujours permis de payer toutes nos factures, en ayant un revenu très bas, même lors de notre plus mauvaise année (2016/2017 – un nouveau parasite sur les brebis, aléas climatiques sur le pâturage et le fourrage). Le redressement judiciaire est annulé le 3 avril, suite à un recours devant la Cour d’Appel de Toulouse, ainsi que la majeure partie de la « dette » réclamée (15000€). Restaient à payer des frais de procédure (2800€).

Suite à cette annulation, nous avons à nouveau entamé des démarches auprés de la MSA pour revenir sur la période 2014-2016 ainsi que sur les montants RSA perçus. Nous avons obtenu, grâce au soutien d’un collectif d’une trentaine de personnes dédié à cela (dont le Cafca), plusieurs rendez-vous avec la MSA. Sont alors apparus d’autres défauts de versement, en plus du RSA, qui ont été régularisés le vendredi 28 juin (2500€). Après une demande de levée de prescription pour la période 2013/2016 auprès du conseil départemental, nous avons obtenu 5000€ pour régler les litiges de ces 3 années.

En juillet, nos versements de RSA ont redémarré. En décembre, ils se sont à nouveau arrêtés, malgré un courrier du conseil général les garantissant pour 1 an. Un nouvel organisme (acor) est chargé du suivi des dossiers RSA. Suite à un rendez-vous en octobre, notre interlocuteur a obtenu le versement des 10 premiers mois de l’année. Le RSA a été versé normalement, soit 450€. Puis… En janvier, RSA a nouveau coupé…

Nous voulons mettre en évidence que les erreurs de la MSA ont influé comme phénomène aggravant sur plusieurs aspects de notre quotidien durant 6 ans :

– les conditions de vie et la nourriture de notre foyer,

– les soins parfois réduits du troupeau et l’usure du matériel, qui ont participé au cercle vicieux des aléas techniques auxquels nous avons dû faire face, – la nécessité pour V. d’abandonner son statut de conjointe collaboratrice,

– des centaines d’heures perdues et le coût des trajets à nous rendre à l’accueil de la MSA ou à répondre aux exigences de la procédure judiciaire qui n’a pu se régler à l’amiable, – les amendes quant à l’entretien de notre véhicule, – nos interdits bancaires,

– le besoin d’un soutien financier familial durant plus d’un an, qui crée des tensions,

– un préjudice moral tant notre ferme et notre parole sont peu considérées.

Nous avons pour cela été tous les deux suivis par des psychologues qui en attestent. Nous souhaitons poursuivre notre activité sereinement, et qu’elle nous permette un bénéfice décent. Notre objectif est bien de vivre de notre activité et non du RSA.