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Des milliards d’aides sociales non distribuées : Un gâchis nommé NON RECOURS. [aide-sociale.fr]

Des milliards d’aides sociales non distribuées

La France a établi une solide tradition de protection et d’aide sociale de l’état. La constitution de la Vème république prévoit notamment que : “Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence“.

Or il existe aujourd’hui un phénomène nuisible à la bonne marche de la solidarité nationale : le non-recours aux droits. Bien qu’il soit difficile de le mesurer précisément, sachez qu’en France certaines prestations majeures frisent le taux de 40% de personnes qui ne la perçoivent pas alors qu’elles y sont éligibles. Plusieurs facteurs expliquent ce chiffre si élevé, mais à l’évidence, les personnes qui ne recourent pas à leurs droits manquent d’informations et sont découragées par les démarches administratives trop complexes.

Les pouvoirs publics semblent peu à peu se préoccuper de cette question du non-recours qui représente un enjeu de taille pour les années à venir. En effet, il s’agit d’une part d’endiguer les difficultés croissantes des personnes en situation de pauvreté et le creusement des inégalités sociales, et d’autre part de contenir le coût de l’aide sociale dans des limites raisonnables.

Alors, vers où se dirige-t-on ? On continue de stigmatiser les personnes les plus fragiles en les taxant d’assistés ou doit-on reconsidérer la solidarité comme l’un des piliers de la république et exiger que chacun puisse en bénéficier ?

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Que vont devenir les indemnités chômage ? [ Sur Radio Saint-Affrique émission du 13/04/2021 ]

Le gouvernement engage une nouvelle régression des règles d’indemnisation de l’assurance chômage.

Dans une économie qui produit de plus en plus de richesses sans les redistribuer à tous, dans une période où l’emploi, les heures de travail sont menacés pour de nombreux habitants, la perspective d’une nouvelle attaque aux Droits des plus précaires est révoltante. Elle aura aussi des conséquences terribles pour tous et toutes les salarié-es.

Radio Saint Affrique interroge un conseiller de Pôle Emploi , par ailleurs militant syndical pour informer des conséquences concrètes de cette nouvelle réforme.

https://www.radiosaintaffrique.com/emissions/a-la-votre/A_la_votre_Avril-4344

« L’entretien avec l’agent de la CAF a été une humiliation » : Les bénéficiaires du RSA dans l’enfer des contrôles [lemonde.fr]

Au fil des ans, des progrès du big data et des croisements de fichiers, les Caisses d’allocations familiales et les départements intensifient leur chasse aux fraudeurs, parfois jusqu’à l’acharnement.

Le 20 février 2020

 

OLIVIER BONHOMME

 

Sur fond de consensus politique, et forte du soutien de l’opinion publique, la chasse aux fraudes à la prestation sociale est ouverte. Les Caisses d’allocations familiales (CAF), qui toutes prestations confondues (allocations familiales, aides au logement, allocation aux adultes handicapés…) distribuent quelque 95 milliards d’euros à 13,5 millions d’allocataires sont en première ligne. Au fil des ans, des progrès du big data, et des interconnexions de fichiers, elles intensifient et raffinent les contrôles – parfois jusqu’à l’acharnement, comme le dénoncent plusieurs associations telles qu’ATD Quart Monde, le Secours catholique, Aequitaz, et jusqu’au Défenseur des droits.

« J’ai eu le malheur de pointer au chômage avec un jour de retard, raconte Pierre (qui a requis l’anonymat), un Lyonnais de 40 ans, qui bien que diplômé en droit était sans emploi, à l’époque. J’ai immédiatement été radié de Pôle emploi, mais, après explications, vite rétabli. Malheureusement, la CAF avait de son côté (et sans me prévenir) suspendu mon droit au RSA [revenu de solidarité active] et à l’APL [aide personnalisée au logement], et là je me suis heurté à un mur pour récupérer mes droits. »

Les fichiers du fisc, de Pôle emploi et de la CAF sont, en effet, connectés entre eux : l’une des conditions de l’octroi du RSA est d’être en recherche active d’un emploi, et toute démarche auprès de l’un a des conséquences sur l’autre – pour ce qui est des CAF, cela se matérialise bien souvent par une interruption abrupte des versements.

« L’entretien, au printemps 2019, avec l’agent de la CAF a été une humiliation, poursuit Pierre. Il avait sous les yeux mes comptes bancaires et épluchait chaque ligne. Avais-je vraiment besoin d’un abonnement Internet ? A quoi avais-je dépensé ces 20 euros tirés en liquide ? Je me suis senti rabaissé. Je suis resté sans ressources pendant dix mois, j’ai frisé l’expulsion de mon logement, fait une dépression, et, bizarrement, ce n’est qu’après avoir consulté un avocat que, en une semaine, tout s’est débloqué. » Depuis, Pierre a retrouvé un emploi.

Accès à de multiples fichiers

L’activité de contrôle prend une dimension industrielle avec, en 2019, des vérifications automatiques (28 millions), des contrôles sur pièces (234 000), sur rendez-vous ou au domicile (170 000), menés par près de 2 500 agents dont 700 habilités à se rendre sur place, « des personnes formées, assermentées, agréées par le tribunal et supervisées », précise Matthieu Arzel, responsable du département de lutte contre la fraude à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF).

La CAF a, en outre, accès à de multiples fichiers, aux comptes bancaires ou aux données des caisses de retraite. Mais tous ses agents ne sont pas à l’aise avec ces méthodes qu’une ancienne chargée de recouvrement n’hésite pas à dénoncer : « Chaque année, on nous assigne des objectifs de montants et de taux de recouvrement qui, s’ils sont atteints, nous font gagner des points pour une prime d’intéressement en fin d’année et, pour les cadres, des points d’avancement de carrière. Tant pis si les sommes à recouvrer sont prescrites ou si les dossiers ne sont pas assez étayés… On commence le recouvrement avant que les recours soient tranchés et si l’allocataire ne se défend pas et ne prend pas d’avocat, on va jusqu’au bout, jusqu’à l’huissier. »

En 2019, ces redressements ont permis de récupérer 894,6 millions d’euros d’indus dont 323,7 millions considérés comme fraudés. « Ces contrôles n’aboutissent pas tous à des sanctions. Dans un cas sur trois, nous restituons de l’argent à l’allocataire », plaide M. Arzel, qui reconnaît : « Nous avons des progrès à faire dans la rédaction de nos courriers, qui doivent être plus clairs et plus explicites, et projetons de puiser le plus souvent possible les informations dans les fichiers source afin de ne pas réclamer sans arrêt des pièces aux allocataires. Un objectif prioritaire, en 2021, est de traquer les fraudes à gros enjeu, montées souvent à base de faux documents par des réseaux constitués. »

« Je suis à bout ! »

Les 1,8 million de bénéficiaires du RSA, allocation jugée « fraudogène », sont les plus ciblés : sur les 44 135 erreurs et fraudes aux allocations repérées en 2019, 46 % concernent le RSA, 19 % la prime d’activité et 18,5 % l’APL.

Deux motifs principaux sont invoqués. D’abord, la triche sur la déclaration de revenus (69 % des infractions), le RSA étant attribué sous conditions de ressources de tous les membres du foyer, ces dernières devant être réactualisées chaque trimestre. Des parents se voient par exemple redresser pour n’avoir pas déclaré les revenus que leurs enfants ont gagnés comme livreurs.

Deuxième motif : la fraude sur la situation familiale (lorsque l’on oublie de déclarer le départ d’un enfant majeur), ou encore ce que les enquêteurs de la CAF appellent la « fraude à l’isolement » (une situation de couple non déclarée). Dans ce dernier cas, ils se rendent, parfois sans prévenir, au domicile, interrogent les voisins et traquent le moindre indice. « Ces “contrôles des brosses à dents”, particulièrement intrusifs, visent avant tout les femmes seules avec enfants et placent la famille dans une insécurité permanente, dénonce Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD Quart Monde. C’est d’ailleurs presque toujours à la femme que l’on réclame le remboursement des indus », note-t-elle.

Le contrôle, certes légitime, peut devenir insupportable lorsqu’il est vécu comme une suspicion obstinée et irréfutable. Sommée de justifier de revenus qu’elle ne percevait pas, Rhita Hardy, 58 ans, écrivait au conseil départemental du Puy-de-Dôme et à la CAF, le 14 décembre 2019 : « Croyez-moi, si j’avais de tels revenus, je me passerais du calvaire, du stress, de l’épuisement moral que me font subir les deux administrations (…). Je suis à bout ! Je n’en peux plus ! Depuis que j’ai mis les pieds dans ce maudit département, je vis un calvaire administratif sans précédent (…), et, à 58 ans, c’est épuisant, déprimant et [cela] pouss[e] au suicide ! »

Neuf jours plus tard, « le 23 décembre 2019 au matin, les gendarmes sont arrivés au magasin pour m’annoncer que Rhita s’était pendue dans la forêt, en haut du village », raconte Franck, son ancien compagnon, père de leur fille, aujourd’hui majeure. Bien que séparés, Rhita et lui étaient associés dans l’épicerie qu’ils avaient ouverte en 2018 dans un village du Puy-de-Dôme, à la grande satisfaction des habitants.

Soupçonnée de cacher des ressources

En débarrassant l’appartement, Franck a retrouvé l’épais dossier des démêlés de son ex-compagne avec la CAF de Clermont-Ferrand, qui lui avait pendant près de un an coupé le versement du RSA et de l’aide au logement, la soupçonnant de disposer de ressources cachées, d’être aidée financièrement par son ex-mari ou par Franck lui-même, qui habite le même village, à 800 mètres.

« Elle était très rigoureuse et transparente, se souvient Franck. Tous les trois mois, elle attestait, documents comptables certifiés à l’appui, qu’elle ne tirait aucun revenu de l’épicerie (qui est aujourd’hui fermée alors qu’elle commençait à bien fonctionner), et qu’elle aurait, selon notre expert-comptable, permis de dégager deux salaires en 2020. Pôle emploi avait bien compris l’intérêt de ce projet ; pas la CAF, qui a harcelé Rhita, avec des contrôles chez elle, et [d’autres] de ses comptes bancaires… »

Son avocat, David Bapceres, se souvient : « La procédure a duré des mois jusqu’à ce que la CAF et le département reconnaissent, en trois lignes d’un style froid, sans motivation ni détails, leurs torts, en décembre 2018, quelques jours avant l’audience du tribunal administratif, que nous avions saisi. Cela a donc coupé court à tout jugement, mais, quelques semaines plus tard, la CAF est revenue à la charge avec les mêmes demandes et arguments, et le drame est arrivé. J’avais vu combien cette affaire minait Mme Hardy, tout comme [elle me minait] moi, d’ailleurs. Les familles sortent lessivées, épuisées par ces procédés. »

« Nous agissons par délégation du conseil départemental, qui a ses propres règles d’évaluation des travailleurs indépendants », explique Didier Grosjean, directeur de la CAF du Puy-de-Dôme depuis le 1er février 2019, et qui à l’occasion de notre entretien a découvert les circonstances du décès de Mme Hardy. « Je compatis à la détresse de cette famille », tient-il à assurer, avant de rappeler la règle générale : « Un allocataire sur deux est contrôlé chaque année. Les revenus et la situation familiale pouvant évoluer rapidement, cela justifie des contrôles fréquents. Avec Mme Hardy, les échanges ont été nombreux. » Et de renvoyer toute demande d’éclaircissements vers le département.

Me David Bapceres reçoit chaque jour des dizaines de demandes d’allocataires poursuivis. Sur les 1 700 affaires qui ont été judiciarisées, il en a gagné plus des deux tiers. Plutôt habitué à une clientèle aisée, cet avocat fiscaliste a, dans son contentieux avec la CAF pour des clients bien plus précaires, découvert le déséquilibre de leurs droits face à une administration qui pratique peu le contradictoire. Les allocataires n’ont par exemple pas accès aux rapports qui les mettent en cause, les décisions contre eux ne sont pas motivées, les voies de recours ne sont pas précisées… Et les CAF suspendent sans préavis tout versement pendant les recours avant leur examen, ce qui est illégal.

« J’essaie de motiver mes confrères sur ce contentieux chronophage et qui rapporte peu, et je suis certain que, si nous nous mobilisons, nous parviendrons, comme dans le domaine fiscal, à faire adopter par les CAF la culture du contradictoire », estime l’avocat. Dans ce but, il a fondé l’Association nationale des avocats et des praticiens en droit des prestations sociales (Anapps).

Droit à l’erreur

« Les atteintes aux droits des bénéficiaires causées par le durcissement continu de la politique de lutte contre la fraude aux prestations sociales » ont bien été identifiées, en ces termes, dès septembre 2017, par Jacques Toubon, alors Défenseur des droits. Il demandait, entre autres remèdes, que soit instauré un « droit à l’erreur » permettant de rectifier toute déclaration, lequel a bien été inscrit dans la loi pour un Etat au service d’une société de confiance (loi Essoc, du 10 août 2018). « Mais je ne l’ai jamais vu mis en œuvre », constate Me Bapceres. « Il existe bel et bien, assure Matthieu Arzel, et c’est d’ailleurs la rubrique la plus consultée du site de la CAF. »

Le directeur général de la CNAF, Vincent Mazauric, haut fonctionnaire, ancien directeur général adjoint des finances publiques, reconnaissait ainsi, le 23 juin 2020, devant une commission d’enquête de l’Assemblée nationale : « A l’évidence, nous ne recourons pas assez largement au principe du contradictoire. Nous allons l’étendre de manière systématique aux contrôles sur pièces. » En attendant, l’organisme tisse une toile de plus en plus serrée et affine ses listes de profils à risques : autoentrepreneurs, artistes, intermittents du spectacle…

Depuis 2019, un nouvel outil, dont la CAF est très fière, permet d’identifier toute connexion sur son site depuis l’étranger de la part d’un allocataire mettant à jour ses données – et, de ce fait, de donner l’alerte. Les bénéficiaires du RSA sont en effet censés résider en France et ne pas s’absenter du territoire plus de quatre-vingt-douze jours par an (cent vingt jours pour les bénéficiaires de l’APL).

Jamila (le prénom a été modifié), 44 ans, qui habite à Roubaix (Nord), l’a appris à ses dépens. Elle avait un petit ami qui vivait en Belgique (et désormais au Royaume-Uni) et qui lui rendait visite les week-ends. Elle s’est donc connectée plusieurs fois depuis ces pays, ce que la CAF a immédiatement interprété comme étant une longue absence hors de France.

« Quand j’ai enfin compris ce que l’on me reprochait – car ce n’était écrit nulle part –, j’ai fourni tous les justificatifs : factures d’électricité, témoignages de voisins… L’agent avec qui j’ai eu un entretien s’est montré particulièrement agressif et suspicieux, se mêlant de ma vie intime », raconte-t-elle. L’intervention du Groupe d’information et de soutien aux allocataires et aux familles a été décisive pour rétablir les droits de Jamila : « Les méthodes de la CAF sont hallucinantes, très souvent illégales, et escomptent que les allocataires ne se défendront pas », explique son animateur, Amine Elbahi, dont l’association met un point d’honneur à ne pas défendre les fraudeurs.

Contrôles de masse

La CAF n’est que l’opérateur du RSA, dont les conseils départementaux sont, depuis 2003, les pilotes et les financiers (l’Etat ne compensant que la moitié de leurs dépenses). Ils assurent donc le volet d’insertion et d’accompagnement vers l’emploi de plus de 2 millions de bénéficiaires, alors que, quand a été créé le revenu minimum d’insertion (RMI), en 1988, ces derniers n’étaient que 350 000.

Il était prévu que 20 % du budget RSA soit consacré aux actions d’insertion, mais cette part est aujourd’hui réduite à 6 % ou 7 % en moyenne. Les départements déploient leurs propres contrôles, en plus de ceux de la CAF et de Pôle emploi, grâce à leurs équipes spécialisées chargées de repérer les bénéficiaires qui ne respectent pas le contrat d’engagement réciproque, en principe négocié, qu’ils ont signé.

Refuser une offre d’emploi, ne pas suivre une formation jusqu’au bout, ou, tout simplement, ne pas se présenter à une convocation du référent peut conduire à la réduction temporaire ou définitive de 50 %, 80 % ou 100 % du RSA, voire à des amendes. Ces sanctions sont décidées dans des commissions d’équipes pluridisciplinaires, lesquelles réunissent élus, travailleurs sociaux et, en théorie, représentants des allocataires. C’est devant elles que sont convoquées, collectivement ou individuellement, les personnes visées.

« C’est un véritable tribunal, un conseil de discipline, estime Jérôme Bar, cofondateur de l’association Aequitaz, qui milite pour la justice sociale. Le fait que le travailleur social référent devienne un juge ne peut que biaiser le dialogue et briser la confiance. Comparaître devant cette commission est stressant, inefficace car décourageant, et injuste, puisque toute la famille est pénalisée. »

Certains départements procèdent même à des contrôles de masse en convoquant toutes simultanément 500 à 800 personnes, et les absents non excusés sont sanctionnés. En 2019, 115 000 foyers auraient subi ce sort, selon une enquête d’Aequitaz et du Secours catholique publiée en octobre 2020.

Echange de « bonnes recettes »

Le département du Nord avait, en 2016, montré l’exemple de la rigueur en radiant d’un coup plus de 15 000 allocataires. « Quand je suis arrivé à la tête du département, en 2015, la collectivité était en difficulté financière, avec une dette de plus de 100 millions d’euros auprès de la CAF au titre du RSA, raconte Jean-René Lecerf, président (Les Républicains) du conseil départemental depuis 2015. Je me suis aperçu que 45 000 allocataires étaient dans la nature, alors nous avons repris contact avec eux, radié tous ceux qui n’[avaie]nt pas répondu, mais aussi remobilisé les dispositifs d’insertion et de recherche d’emploi. Entre 2016 et 2020, le département a appliqué près de 50 000 sanctions. Quelques voix m’ont, au début, reproché de mener la chasse aux pauvres, mais j’ai aujourd’hui le soutien de tous les courants politiques, y compris de Martine Aubry [maire socialiste de Lille]. »

Le département du Nord aurait ainsi économisé entre 2 et 3 millions d’euros par an. Ces résultats et ces méthodes intéressent d’autres départements. Le conseil départemental de l’Eure, qui prône « le juste droit », a, depuis 2016, mandaté la CAF pour réaliser, en son nom, une centaine de contrôles par an, au lieu de vingt auparavant. En 2019, celui de Tarn-et-Garonne a radié 360 allocataires sur 6 533 et en a sanctionné 1 110 autres.

Sur les forums de discussion entre fonctionnaires territoriaux, les « bonnes recettes » s’échangent. « Sur le RSA, les premiers contrôles ont porté sur les travailleurs indépendants, avec demande de relevés bancaires [professionnels] et personnels. Ce créneau semble très porteur », se félicite un contrôleur des Hauts-de-Seine. « Si pas de contrat [d’engagement réciproque signé], radiation après trois mois », recommande de son côté un responsable de Tarn-et-Garonne.

« La lutte contre les fraudes au RSA est, bien sûr, motivée par un souci de bonne gestion de l’argent public, analyse Vincent Dubois, sociologue et politologue, professeur à Sciences Po Strasbourg, et auteur de Contrôler les assistés. Genèses et usages d’un mot d’ordre (à paraître en avril aux éditions Raisons d’Agir). Mais elle est devenue un marqueur politique, un argument électoral, avec l’accord de ceux, à gauche, qui ont mis en place le revenu minimum d’insertion – l’ancêtre du RSA – et veulent prouver qu’ils ne sont pas naïfs. »

« Dommage que toute l’énergie et tout l’argent dépensés dans les contrôles ne soient pas mobilisés pour un soutien bienveillant aux familles, déplore Marie-Aleth Grard. Nous demandons, avec le Secours catholique, que l’État fasse confiance aux pauvres. »

 

 

Lien

Les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) doivent toujours, sous peine de menaces de suspension de leur allocation, faire acte de recherche d’emploi, ne pas oublier la moindre pièce dans leur dossier ou se rendre à des rendez-vous nullement nécessaires. Un dispositif de flicage qui a toujours été injuste des plus pauvres mais qui ne connaît aucune trêve en période pandémique et de crise économique et sociale.

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« des centaines d’heures perdues… »

V. et F. vivent en couple dans une ferme sur les bas la barguillère où illes se sont installés en 2009. Avec leurs quelques 80 brebis illes produisent du fromage qu’ils vendent directement depuis la ferme. Avec 6 enfants à charge, dont une seule est majeure en 2013, et 3 en garde alternée. Cette année-là marque le début d’un parcours administratif épuisants. Depuis lors, ils se débattent pour avoir accès à leurs droits et ainsi pouvoir vivre et mener leur activité agricole dignement. Illes nous racontent leur histoire :

Nous avons demandé le RSA au printemps. En novembre, nos droits à cette aide ont été ouverts. Mais aucun versement. Ni aucun référent RSA désigné.

Malgré nos appels réguliers, un courrier en recommandé avec AR, plusieurs visites à une assistante sociale de l’ADS de Saint Girons, nous n’avions toujours ni renseignements ni versements. Toujours dans la même situation, nous avons tardé (quelques mois) à présenter notre avis de non-imposition sur les revenus de 2012. Nous l’avons transmis en juillet, mais au mois d’août, nous avons été radiés. Au début de l’année, nous avons cessé de payer nos cotisations MSA, qui s’élevaient chaque année à environ 3300€ plus 2400€.

En septembre, pour la première fois, la MSA nous versait 6 mois de RSA, pour un montant de 2245€, ce qui correspondait à un montant mensuel de 375€. Nous avons demandé que ces sommes soient réévaluées, en vertu du minimum fixé pour un couple et « 3,5 enfants », qui s’élève à 1100€/mois environ (allocations familiales + RSA). La MSA précisait que ce versement correspondait à la période de novembre 2013 à avril 2014. Mais elle ne disait rien pour le reste de la période écoulée, rien pour l’avenir non plus.

En octobre, on nous signifie une dette de 2000€, en raison d’un trop-perçu d’allocations familiales. Nous avons sollicité le médiateur de la République pour régler cette situation, sans résultat.

En janvier, on nous écrit que cette dette, bien que réduite de moitié pour motif de « précarité », absorbe notre RSA de la fin 2016.

En mars, je me suis rendu à la MSA de Foix pour obtenir des réponses quant aux non-versements. J’ai attendu calmement à l’accueil qu’on me reçoive, jusqu’à ce que la police soit appelée pour me faire quitter les lieux. Peu de temps après, la MSA nous a versé l’équivalent de 4 mois de RSA. Un référent nous est désigné.

En juillet, j’ai renouvelé l’opération et la MSA m’a de nouveau versé 3 mois. A partir d’août, le RSA n’est plus payé. Pour réduire le montant de nos cotisations, V. a cessé d’être déclarée à l’administration comme conjointe collaboratrice. Pour récapituler, de novembre 2013 à avril 2018 (54 mois), nous nous sommes vus verser 13 mois de RSA, avec des retards allant jusqu’à 2 ans.

En début d’année, le RSA nous est versé. Mais la MSA demande que notre ferme soit déclarée en cessation de paiement au Tribunal de Grande Instance de Foix, pour une dette de 17 000€. Au tribunal, on me signifie que la dette est réévaluée à 12 400€. Je la reconnais, en précisant les défauts de versements du RSA. Une conciliation est ordonnée. La conciliation échoue au bout de 4 mois, après que nous ayions opposé nos relevés de compte de 2013 à 2017 à deux récapitulatifs des versements (contradictoires entre eux) de la MSA. Lors des échanges de mails avec le conciliateur, la partie adverse a été insultante et a maintenu ses mensonges. Ils parlaient de droits ouverts et non de versements. Pendant la conciliation, la MSA a régularisé un retard de versement de 2500€, soit environ 6 mois.

Le 5 septembre 2018, le jugement s’achève sur notre mise en redressement judiciaire signifiant que la viabilité de notre ferme est en question. Pourtant, nos rentrées nous ont toujours permis de payer toutes nos factures, en ayant un revenu très bas, même lors de notre plus mauvaise année (2016/2017 – un nouveau parasite sur les brebis, aléas climatiques sur le pâturage et le fourrage). Le redressement judiciaire est annulé le 3 avril, suite à un recours devant la Cour d’Appel de Toulouse, ainsi que la majeure partie de la « dette » réclamée (15000€). Restaient à payer des frais de procédure (2800€).

Suite à cette annulation, nous avons à nouveau entamé des démarches auprés de la MSA pour revenir sur la période 2014-2016 ainsi que sur les montants RSA perçus. Nous avons obtenu, grâce au soutien d’un collectif d’une trentaine de personnes dédié à cela (dont le Cafca), plusieurs rendez-vous avec la MSA. Sont alors apparus d’autres défauts de versement, en plus du RSA, qui ont été régularisés le vendredi 28 juin (2500€). Après une demande de levée de prescription pour la période 2013/2016 auprès du conseil départemental, nous avons obtenu 5000€ pour régler les litiges de ces 3 années.

En juillet, nos versements de RSA ont redémarré. En décembre, ils se sont à nouveau arrêtés, malgré un courrier du conseil général les garantissant pour 1 an. Un nouvel organisme (acor) est chargé du suivi des dossiers RSA. Suite à un rendez-vous en octobre, notre interlocuteur a obtenu le versement des 10 premiers mois de l’année. Le RSA a été versé normalement, soit 450€. Puis… En janvier, RSA a nouveau coupé…

Nous voulons mettre en évidence que les erreurs de la MSA ont influé comme phénomène aggravant sur plusieurs aspects de notre quotidien durant 6 ans :

– les conditions de vie et la nourriture de notre foyer,

– les soins parfois réduits du troupeau et l’usure du matériel, qui ont participé au cercle vicieux des aléas techniques auxquels nous avons dû faire face, – la nécessité pour V. d’abandonner son statut de conjointe collaboratrice,

– des centaines d’heures perdues et le coût des trajets à nous rendre à l’accueil de la MSA ou à répondre aux exigences de la procédure judiciaire qui n’a pu se régler à l’amiable, – les amendes quant à l’entretien de notre véhicule, – nos interdits bancaires,

– le besoin d’un soutien financier familial durant plus d’un an, qui crée des tensions,

– un préjudice moral tant notre ferme et notre parole sont peu considérées.

Nous avons pour cela été tous les deux suivis par des psychologues qui en attestent. Nous souhaitons poursuivre notre activité sereinement, et qu’elle nous permette un bénéfice décent. Notre objectif est bien de vivre de notre activité et non du RSA.

 

« rendez-vous foireux, faux-semblants, normalisations forcées… »

J’ai eu besoin du rsa durant un temps lors du début de mes 2 installations agricoles, du fait que pour tirer revenu d’une activité agricole « particulière », il m’a fallu un certain temps… Les 2 premières années, outre l’installation, j’ai eu des soucis avec mes vaches. Concrètement, on a dû tuer 2 jeunes vaches à 2 années d’intervalle… Or, sur un petit troupeau de 4, 5 mères ça fait beaucoup ! Donc, pendant ce temps, on a demandé le rsa et même s’il m’a fallu me rendre à quelques rendez-vous « obligatoires », à l’époque, la personne du Conseil Général était très compréhensive et m’a soutenu… même si elle disait que pour le département, le rsa n’était pas une solution pérenne, dans le sens où il n’était pas fait pour soutenir des installations bancales ! Je suis perplexe quant à ce discours : aujourd’hui, qu’est-ce qu’une installation agricole non bancale ? que gagne la majorité des agriculteurs ? et surtout avec quelle dépendance vis à vis des instances étatiques et européennes ? qu’est-ce qu’un rsa vis à vis des subventions de la pac ? il y a 3 ou 4 ans, et cela a dû certainement augmenter, la moyenne des primes PAC en Ariège était de plus de 20 000 € par exploitation !!!! Alors, avec ça en tête, comment ne pas être en colère contre les discours qui tendent à culpabiliser les personnes qui, pour s’en sortir tant bien que mal avec leur ferme sont obligées de passer par la case rsa… et c’est souvent ces personnes qui sont exclus des bonnes terres, des hectares en pagaille et des primes qui vont avec ! Donc le RSA m’a aidé et je suis aussi satisfait de ne plus y avoir recours ! J’ai toujours souhaité être indépendant des institutions…et surtout des obligations qui vont avec : rendez-vous foireux, faux-semblants, normalisations forcées, etc… Une petite parenthèse au sujet des primes et du rsa : les primes imposent une conditionnalité à leur obtention, un parcours administratif du combattant (dossier désormais informatisé et complexe) et donc, et c’est leur objectif, imposent des pratiques, des choix et une certaine normalisation agricole… alors que le rsa, au départ, est là pour celles et ceux qui ne s’en sortent pas économiquement et devrait donc être versé sans contrepartie… ce pourrait (ou devrait) donc presque être un moyen de se réapproprier l’agriculture, en marge des injonctions de rentabilité perpétuelles.

« Je me dis parfois qu’il serait plus simple de ne pas travailler du tout »

Je donne des cours dans le domaine du bien-être avec le statut d’auto-entrepreneur. C’est gratifiant car les gens sont très reconnaissants pour le bien que ça leur procure, dans leur corps mais aussi leur mental. Étant donné le contexte politique, social et sanitaire, le besoin de se détendre, de se ressourcer, de calmer les angoisses, de retrouver de la joie et de la tranquillité, est de plus en plus pressant…

J’ai perçu le RSA la deuxième année d’exercice de mon auto-entreprise (suite à un divorce), cela m’a permis de poursuivre cette activité et, à partir de la troisième année, elle a commencé à être viable. Ce qui m’amène à la conclusion que, sans le RSA, j’aurais effectivement dû trouver un travail alimentaire. Cela ne m’aurait laissé ni le temps ni l’énergie de donner ces cours de yoga qui, à mes yeux, œuvrent pour le bien commun.
Face à la pénurie d’emplois, je mets beaucoup d’énergie à créer mon propre job ; mais lorsque je suis confrontée aux aberrations administratives, je me sens tellement découragée que je me dis parfois qu’il serait plus simple de ne pas travailler du tout !
Lors de l’entretien avec Acor en août dernier, puis septembre, on m’a demandé de signer un contrat m’engageant à avoir un chiffre d’affaires stable de mois en mois, ou bien en progression constante (au choix). Or, comme je l’ai expliqué à la personne d’Acor, un chiffre d’affaires n’est pas un salaire et ne saurait être constant, surtout quand il y a un aspect saisonnier. Cela me paraît d’autant plus décalé par rapport à la réalité que, si j’ai perçu le RSA pendant 3 mois en cette année 2020, c’est à cause du (premier) confinement… Cette personne m’a répondu : « on n’est pas là pour financer les entreprises ». Cela a au moins le mérite d’être clair… Et « si vous n’arrivez pas à tenir ces objectifs, il faudra prendre un travail alimentaire ». Cela équivaut à radier d’office tous les auto-entrepreneurs du dispositif du RSA. Vaudrait-il mieux aller grossir les rangs des chômeurs ?

Histoire sans fin…

Fin 2014, j’arrivais à la fin de mes indemnités chômage. Je me suis rendu à pôle emploi pour postuler à une offre d’emploi depuis le bureau de ma conseillère pour avoir une réponse rapide. À ce moment-là elle me parle d’un programme d’insertion financé par l’Union Européenne via le FSE (Fond de Solidarité Européen). Elle me demande de m’inscrire car ils ont besoin de 10 candidats pour démarrer le projet, m’affirmant qu’avec ce parcours je pourrai intégrer le poste que je souhaitais en tant que stagiaire rémunéré. J’acceptai donc d’intégrer ce projet.

Le 19/12/2014 je suis convoqué au sein de l’AFPA de Foix pour confirmer mon intérêt pour cette formation. Je repars avec mon invitation pour participer à l’information collective suivi des tests d’entrées et de l’entretien individuel pour la session qui démarre en janvier 2015. Les tests réussi j’intègre la formation au sein du GRETA. J’ai fait mes stages d’infirmiers qui ont été très appréciés par les infirmiers tuteurs grâce à mes connaissances, autonomie et capacité à appliquer des soins. J’ai été élu délégué principal pour faire remonter les besoins des stagiaires et les obstacles qu’ils rencontrent pour finaliser leurs projets en vue d‘améliorer la formation. A ce moment là, les représentants du conseil départemental m’orientent vers le DAEU –B qui est rémunéré par une bourse sociale pour les RSAstes et par l’AREF du pôle emploi pour les chômeurs indemnisés, en me donnant les coordonnées des personnes mieux informées sur le sujet (MISSION LOCALE/maison de l’emploi). Sans perdre de temps je m’inscris au DAEU pour être dans la continuité puisque le début de cette nouvelle formation commence à la fin de la première. Je suis accepté. Après 3 mois, je n’ai toujours pas de nouvelle de ma bourse. Je contacte ma conseillère du GRETA avec qui j’ai signé le contrat CER et là comme par magie mon projet validé se transforme en non validé. Le Conseil Départemental refuse de verser la bourse sociale alors que dans le même temps ils ne me versent plus mon RSA. Normalement je suis sensé avoir le droit à ou l’un ou l’autre…
Une autre personne du DAEU qui voulait intégrer la police nationale a continuée à percevoir son RSA qui était pour elle plus avantageux que de percevoir la bourse. Elle n’a eu aucun problème de versement.
Sans RSA ni bourses d’études, je fais un crédit à la banque pour continuer à pouvoir assister à mes cours. La même année je passe en commission Commission de Solidarité Territoriale (CST), alors que je respectais mon Contrat d’Engagement Réciproque signé avec le Conseil Départemental (CD), et que celui-ci ne me versait plus mon RSA. Ils ont essayé de me persuader d’arrêter les cours en plein milieu de l’année et de faire un autre cursus plus long de 4 ans. J’ai refusé, justifiant que j’étais déjà lancé sur un projet et que c’était stupide de gaspiller temps et argent dans une réorientation.
Toujours pas de revenu, les factures et les loyers s’accumulent et ils continuent de ne pas me verser d’argent malgré tous mes recours.
Je cherche de l’aide. J’explique mon cas à l’université de Toulouse qui trouve que le CD d’Ariège sont des ploucs qui veulent porter des talons, qu’ils devraient avoir honte d’un tel comportement (j’ai eu le soutien moral de leur part et ils avaient signés ma pétition et attendent mon retour avec enthousiasme).
J’ai fait des recours : à la CGT, à la mairie de Foix, chez le sénateur DURAN. Auprès du président du Conseil Départemental de l’époque, Henri NEYROU, qui à accepté de me recevoir dans un premier temps avant que je me retrouve la porte fermée au nez, littéralement. Christine Severin, directrice de service au sein du CD m’emmène dans son bureau et m’explique que ce n’est pas à moi de décider de ma vie et que je ne suis qu’un vulgaire dossier à traiter.
Je cherche de l’aide auprès de La dépêche de l’Ariège ou le rédacteur en chef me dit que le mieux serait de partir sur autre chose, refaire ma vie ailleurs et oublier cette histoire.
J’ai cherché de l’aide auprès du défenseur des droits qui m’a simplement répondu: « on me dit que vous pouvez aboutir à son projet autrement ». et que « c’est ici que [s]on rôle s’arrête, bonne continuation ».
Je me vois privé de mes Aides Pour le Logement. Mes droits aux soins (CMU) ont été supprimés : ne pouvant pas justifier de revenus, il a fallu plusieurs mois de courriers et de recours auprès de la CPAM pour pouvoir à nouveau prendre soin de ma santé qui était dans un état catastrophique. Un jour j’étais tellement mal que j’ai failli me jeter par la fenêtre en pleine nuit glaciale, pensant qu’il valait mieux qu’on découvre mon corps le matin plutôt que de se décomposer pendant une semaine sans que personne ne s’en rende compte. Un médecin a pris la peine de m’ausculter gratuitement et a alors constaté que j’étais réellement en danger: j’ai subi des dégâts irréversibles, et il me fallait absolument une alimentation variée vu la sévérité de mes carences. Le secours populaire m’a apporté son aide en colis alimentaire d’urgence. La générosité de certaines personnes qui venait des bouts de l’Ariège avec de la nourriture m’a redonné des couleurs. Je n’avais plus de téléphone, plus d’internet, plus d’électricité, plus de compte bancaire, plus d’assurance voiture et encore moins un véhicule en état de marche. Ni assurance d’habitation ni protection civique. Le pire c’est que quand je suis allé voir les assistantes sociales de l’ADS elles n’ont rien fait ! Elles m’ont dit que le département c’est leur patron et qu’elles ne pouvaient rien faire sans leur accord. Pire, elles ont osé me dire que c’est normal d’avoir recours à de tels procédures pour faire bouger les précaires.
Le système m’a vomi alors que je ne voulais qu’un meilleur avenir. Ils ont voulu m’intégrer à la précarité par la force.
J’habitais alors dans un appartenant dont la mairie de mon village était propriétaire. Sans APL, ni bourses, ni RSA, les loyers impayés s’étaient accumulés, et la maire, qui plus tard m’afficha clairement le mépris qu’elle avait pour les RSAstes, décida d’entamer une procédure d’expulsion, plutôt que d’essayer de me soutenir dans mes démarches pour faire valoir mes droits. Et lorsque je suis enfin parvenu à convaincre la CAF d’une partie de ses tords, et ainsi de verser près de 7000 euros d’APL en retard à la mairie-propriétaire, cela ne changea rien à sa volonté de me mettre à la rue. Seule une mobilisation du CAFCA m’a alors permis d’obtenir quelque mois de délai supplémentaire. J’ai alors du me débrouiller pour trouver un autre logement, puisque les services sociaux et la préfecture n’ont pas jugé utile d’appliquer mon droit de placement dans un autre logement social.
2018 je me trouve un travail dans la région voisine, je démarre une nouvelle vie en résidant toujours en Ariège. 2020, je crée mon entreprise et je retombe au RSA, avec le covid mes économies partent en fumée, et la CAF me prive de mon RSA et de mes APL sans prévenir, en pleins 1er confinement. Ils justifient cela par un trop perçu de prime d’activité en 2018, or d’après les calculs que j’ai effectué les sommes correspondaient exactement à mes droits. Je fais une première réclamation car je trouvais que c’était pas très moral de supprimer la totalité des ressources sans prévenir. Ils me remboursent la totalité et enclenchent un prélèvement automatique de 50 euro par mois sur mon RSA que je paye encore aujourd’hui. Un mois plus tard je suis convoqué par ACOR pour rédiger un Contrat d’Engagement Réciproque (CER). Contrat que je lis, amande et signe. Celui-ci m’est revenu comme étant non-validé par le Conseil Départemental et pratiquement dans la foulée je reçois une convocation à une CST (commission de solidarité territoriale). Pendant cette séance on me demande de présenter mon projet. Demande bizarre puisque tout était stipulé clairement dans le contrat CER. On m’a demandé aussi ce que je comptais faire pour faire face à la crise sanitaire?! On m’a demandé si j’avais fais en conséquence une étude de marché prévisionnel ?! A ce moment là, je les sens plus en train de chercher une raison de suspendre mes droits que de m’aider…
Heureusement les commissionnaires se sont retrouvé surpris par l’assistance du CAFCA au cours de la séance, et n’ont pas su répondre aux questions qui leurs ont été posés. A la suite j’ai reçu mon Contrat d’Engagement Réciproque dûment signé par le Département. Ils m’accordent un maintien du RSA pour 6 mois à condition de m’inscrire à pôle emploi alors que cet organisme s’était empressé de me radier au moment de déclarer mon entreprise pour faire baisser les chiffres du chômage il y a quelques mois de cela…

Toujours plus de flicage à Pole Emploi

Pour tenter de baisser les « chiffres » du chômage, le plus simple c’est encore de fliquer et radier les chômeurs. Du coup, le gouvernement a étendu, en décembre, l’accès à de nouveaux fichiers concernant votre vie privée par Pole emploi. Après le fichier Ficoba, recensant les titulaires des comptes bancaires, ou Patrim, listant les biens immobiliers, les agents-controleurs ont dorénavant un droit de regard non plus seulement sur les comptes bancaires des allocataires mais aussi sur les opérations que ceux-ci y effectuent. Pôle emploi se voit même confier le pouvoir de demander les relevée téléphoniques de leurs allocataires auprès des opérateurs (Jusque là, seuls les allocataires de la CAF avaient droits à de telles faveurs). Et tant qu’à faire, ils pourront aussi accéder au fichier des assurances-vie (Ficovie)…Sachant qu’il y aurait 18 000 cas de fraudes par ans pour… 2,4 millions de personnes indemnisées. Soit 212 millions de préjudices, à mettre en relief avec les 15 milliards de la fraude sur la TVA, par exemple…

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Répression administrative et mensonges policiers

Pendant le confinement, en Ariège comme ailleurs, de nombreuses personnes ont eu des contraventions car leurs attestations de déplacement n’étaient pas en règle. Selon un groupe d’avocats travaillant sur une loi d’amnistie ces attestations n’avaient aucun fondement juridique et ont donné lieu à des sanctions parfois aberrantes.

Si le conseil constitutionnel a bien validé vendredi 26 juin toutes les mesures et poursuites liées aux contraventions pendant le confinement, il n’en reste pas moins une part d’arbitraire puisque le sens précis des restrictions de déplacement (qu’est-ce qu’un « achat de première nécessité » ? qu’est-ce qu’un « motif familial impérieux » ?) reposait sur « le discernement des agents verbalisateurs ». Certaines personnes en Ariège ont par exemple été verbalisées car elles allaient acheter des cigarettes qui aux yeux du flic n’étaient pas de première nécessité.

Après le confinement deux rassemblements de protestation ont été organisés sur Foix le 11 et le 22 mai. Ils ont aussi donné lieu à de nombreuses contraventions de 135 euros et cela sans aucun contrôle d’identité. Plusieurs personnes verbalisées n’avaient même pas participé au rassemblement voire n’étaient pas à Foix ces jours-là. Les personnes amendées et leurs soutients ont décidé de contester en commun ces amendes avec l’aide d’un avocat toulousain.

Lors de cette contestation de nouveaux abus administratifs se sont produits. Les premiers courriers de réponse qui rejetaient les contestations de contravention ne mentionnaient pas la voie de recours légale (tribunal de police). Suite à une plainte au défenseur des droits les rejets suivants ont mentionné ce recours. Une quinzaine de personnes ont alors fait la démarche du recours au tribunal de police. Au vu des dossiers consultés par l’avocat il semblerait que la police ait menti en prétendant avoir fait des contrôles et qu’elle n’ait aucun document sérieux attestant l’infraction des personnes amendées.

Suite de cette contestation le 4 mars à 9h au TGI de Foix où une dizaine de personnes seront entendues au tribunal de police.

Réforme de l’assurance chomage : le projet (repoussé et en partie déjà retoqué) qu’ils nous préparent…

Depuis le 19 nov 2019 les conditions d’accès à une ouverture des droits à l’allocation de chômage se sont durcies : Il faut avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers mois au lieu de 4 mois sur les 28 derniers mois avant la réforme Au 1er mars 2020, 410 000 travailleurs précaires n’avaient déjà pas pu ouvrir ou recharger leurs droits suite à l’application de ces nouvelles règles. Cette première partie de la réforme a été suspendue cet été (après le premier confinement) mais sera reprise en avril 2021. Les personnes ayant perdu leur emploi entre aout 2020 et mars 2021 n’auront besoin que de 4 mois de travail pour ouvrir des droits mais les personnes ayant perdu leur emploi entre novembre 2019 et août 2020 restent soumises à la règle des six mois. En avril 2021 après deux confinements et leur ribambelle de licenciements cette mesure risque de laisser sur le carreau nombre de salarié-e-s. Cette situation est particulièrement grave pour les salariés de certains secteurs comme les hôtels, cafés, restaurants, l’événementiel, le tourisme et la culture, mais elle l’est aussi pour tou-te-s les travailleurs/euses précaires, dans toutes les industries, les services et même dans les services publics qui usent et abusent de contrats précaires. De même pour tous les travailleurs et travailleuses saisonniers.

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Réinsertion ?! Plutôt chômeuse que contrôleur à la CAF

Le PIB s’effondre, les économistes prédisent des faillites en cascades, les recours aux aides alimentaires distribuées par les associations explosent. 900 000 chômeurs de plus en 2020, et le nombres de bénéficiaires du RSA qui augmente de 10%. Cette année, 1 millions de personnes de plus se retrouvent en dessous du seuil de pauvreté. La pandémie n’est pas seulement une crise sanitaire, c’est aussi une crise économique et sociale d’une ampleur inédite. Et pourtant, la politique d’humiliation et de stigmatisation des plus pauvres se poursuit, sans trêve ni complexe.

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Qui profite ? Qui coûte (très) cher ?

Dans l’Ariège « socialiste » comme pour Macron, les « sans-emploi » ne sont qu’un poids mort. Il faut les faire disparaître des chiffres officiels, les caser pour un temps. Pour ce faire, le département a transféré le suivi des allocataires du RSA de la maison des solidarités (et donc des assistantes sociales) à ACOR, une entreprise privée, qui se décrit comme « recruteur ». Cette bande de manageur·euses se vante de trouver du travail salarié à 70% des précaires qui passent par ses bureaux. Même plus besoin de traverser la rue…

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cafard-labyrinthe

Le CAFCA…

Depuis plusieurs années le Collectif d’Autodéfense Face Aux Contrôles de l’Administration (le CAFCA) se mobilise pour soutenir les personnes se retrouvant prises dans les mailles du filet bureaucratique. Épisodiquement, nous nous retrouvons pour partager nos vécus, s’échanger astuces et compétences pour tenir bon face à la machine.

Nous cherchons à mettre le nez dans les ordonnances, réformes et autres textes indigestes quand une personne se voit maltraitée ou sanctionnée. Mais nous ne sommes ni des expertes de l’administration, ni des pros de la débrouille. Nous essayons de défendre collectivement chacun. Et pour soutenir non pas un dossier mais la personne et le vécu qu’il y a derrière, nous pouvons nous présenter nombreus·es à la MSA (Mutuelle Sociale Agricole), à la CAF, au Conseil Départemental, etc.

Nous cherchons à nous rassembler et nous entraider justement parce qu’ils nous préfèrent isolés. Et nous avons au moins une certitude, c’est qu’ensemble on peut être plus fort·es…

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