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Qui profite ? Qui coûte (très) cher ?

Dans l’Ariège « socialiste » comme pour Macron, les « sans-emploi » ne sont qu’un poids mort. Il faut les faire disparaître des chiffres officiels, les caser pour un temps. Pour ce faire, le département a transféré le suivi des allocataires du RSA de la maison des solidarités (et donc des assistantes sociales) à ACOR, une entreprise privée, qui se décrit comme « recruteur ». Cette bande de manageur·euses se vante de trouver du travail salarié à 70% des précaires qui passent par ses bureaux. Même plus besoin de traverser la rue…


Ainsi donc, en 2020, l’entreprise ACOR a reçu mission, chèrement payée, de « sortir de la fatalité du RSA ». De fait les entretiens deviennent menaçants, les « commissions » (CST) chargées de sanctionner les allocataires se sont réunies même en ces temps d’urgence sanitaire et d’appauvrissement, en dépit de la recommandation du gouvernement de maintenir les droits ouverts pendant la période.
Mais quelle est cette fatalité du RSA pour l’Ariège ? Est-ce la fatalité de l’absence d’emplois, malgré les investissements publics faits depuis tant d’années dans le secteur industriel privé, dans le tourisme ou dans l’agriculture conventionnelle ? Ou est-ce la fatalité de devoir donner trois sous à « ceux qui ne sont rien » en ces temps d’épidémie où les injustices économiques sont flagrantes ?

Qui profite ? Qui coûte (très) cher ?

D’un côté nous voyons toujours plus de cadeaux faits aux riches, aux grosses entreprises, à toutes celles et ceux qui savent si bien profiter du système en « l’optimisant » au mieux de leurs intérêts (optimisation fiscale, agricole..) ou en chassant les subventions (green economy)… Et d’un autre côté, c’est nous qu’on fait passer pour des profiteur·euses, premier·es responsables de nos galères, coupables de coûter à la société « un pognon de dingue ».
D’un côté, il y a toujours plus de moyens consacrés aux bureaucraties pour surveiller, changer les consignes, sanctionner… De l’autre, tous les « petits » qui veulent faire quelque chose, sont accablés sous les normes et les autorisations.
D’un côté, nous voyons toute l’aide publique apportée aux industriels les plus pollueurs, les plus menteurs, les plus endettés. Et de l’autre, nous entendons la petite chanson des mercenaires de l’insertion qui répètent aux précaires que tout est de leur faute et qu’on va leur couper les vivres.
Les précaires ne sont pas responsables des catastrophes en cours, des naufrages financiers. D’autres si.

Qui est utile ou inutile ? Qui nous empêche d’avancer ?

Il y a le monde qui « gagne » et qui flambe : la course à « l’innovation » des supermarchés en ligne ou en rayons, l’exploitation sans limite du sol et du sous-sol, la méga-scierie qui veut tous les hêtres des Pyrénées, les méga-fermes, les sablières autorisées à creuser assécher polluer, etc. Et il y a toutes les volontés déterminées qui tentent de s’ajuster avec les besoins et les possibilités de leur coin. Des activités essentielles à la vie de l’Ariège : des métiers, des associations, des lieux pour se rencontrer, des spectacles, de l’artisanat, des terres travaillées, de la nourriture, des villages et des montagnes habités, des emplois nécessaires pourtant méprisés, des échanges, de la solidarité, etc.
Tout cela ferait vivre beaucoup de gens, si on y accordait les moyens qu’il faut. Mais le conseil général ne voit pas ça, n’en fait pas de bilan ni d’étude. Et ce désintérêt trouvera en écho une politique du chiffre chez son sous-traitant de la pauvreté. « 70 % ont retrouvé un emploi ! » Quels emplois vont-ils être obligés d’accepter ? Tous hôtesses, réceptionnistes, « polyvalents » ? Trieurs au SMECTOM… ? Pour combien de temps ? Et quoi après ?
De façon obscène, le Conseil Général aura prétendu aider les « bénéficiaires du RSA », alors qu’il se sera agi de les « d-évaluer » pour en radier autant que possible. Ils seront (re)devenus les précaires du marché du travail, main d’œuvre corvéable et jetable. Et on aura beaucoup détruit au passage.
Il y a longtemps, l’Ariège a déjà vécu la table rase au nom du progrès. Son agriculture traditionnelle a été consciencieusement démolie, elle était pourtant « diversifiée et respectueuse des écosystèmes ». Plus récemment, ce sont les « néoruraux écologistes » qui ont été ridiculisés, pendant qu’ils vivaient de trois fois rien et (ré)inventaient la « bio ». Jugés non « rentables » et pas « innovants » eux non plus !

Droit inconditionnel de ne pas crever la dalle

Nous pensons qu’il est vital de défendre tout ce qui est attaqué, fragilisé par les chefs de guerre du moment, profiteurs en tout genre : les forêts, l’eau, la terre et, chez les humains, ceux qui ne sont pas « gagnants-gagnants ». On vous laisse faire votre liste : les petits de toutes sortes, sans capitaux, sans terres, sans boulot, sans papiers, et si je suis femme et analphabète en plus…
Il est nécessaire et urgent de leur rendre, à eux qui sont privés de moyens et de soutien, la possibilité de bien faire une activité qui a du sens, quel qu’en soit le statut. Ces activités, ces métiers ne demandent pas autant d’investissement que l’industrie, mais un peu quand même, et surtout du temps : le RSA peut-être un appui, en attendant mieux (des outils, des formations, des terres, des locaux, les moyens nécessaires, du soutien pour trouver le bon boulot).
C’est à cette condition qu’on pourra compter sur les forces et les qualités de tous, et peut-être se sortir de là où la « rentabilité » nous a enfoncés..
En attendant, dans ce système économique qui a donné les clés aux riches sans décence ni limite, le droit à un revenu minimum pour les pauvres doit être inconditionnel.